Beg-An-Hent-Bras, Roudouallec
des nouvelles de Félicie
Voici la reproduction d'un article (premier d'une série de trois) paru dans le journal
"Le Dauphiné Libéré" de ce vendredi 24 avril 2009, consacré à la
"Journée Commémorative de la Déportation"
de Dimanche 26 Avril prochain.
Le journal a pris pour exemple le témoignage de notre amie Félicie Le Beux, qui vit désormais dans le département des Hautes-Alpes et dont on connait la dramatique épopée dans les camps de concentration nazis.
Prenons connaissance, à la virgule près, de cet article du Dauphiné Libéré.
...........................................................
SOUVENIR.
Félicie Le Beux, ancienne déportée, avec la soeur de
De Gaulle à la prison de Fresnes.
Avant la Journée Commémorative de la déportation dimanche, c'est un tout petit bout de femme haute de 1m47 qui a décidé de témoigner. Le regard gris-bleu, comme l'Atlantique à proximité duquel Félicie Le Beux est née voici 85 ans, à Roudouallec, dans le Morbihan. Revenue de l'enfer de la déportation, cette Bretonne pure souche a vécu sa vie à Chaillol, où nous l'avons rencontrée dans son appartement haut perché, au lieudit "le Belvédère".
Peut-être trop "Haut-Alpine" pour les Bretons et trop Bretonne pour les "Haut-Alpins", l'histoire de Félicie n'a jamais fait beaucoup de bruit, hormis une courte évocation dans le livre de Marie-Anne Caro:
"La lune brille sur le dolmen".
Félicie, qui n'a jamais rien demandé, ne possède aucune décoration ni médaille.
Par contre, elle détient le dossier original de son internement, tel un chemin de croix, écrit en allemand. Un tel dossier vaut toutes les distinctions
et incline au respect.
Probablement dénoncée
20 ans, l'âge du bonheur, dit-on. Pas sûr du tout. Félicie, aînée de trois jeunes soeurs et d'un frère, est serveuse,depuis la mort de sa maman en 1938, à "l'Hôtel de Bretagne" à Saint-Guénolé en Penmarc'h. Cet hôtel-restaurant a été réquisitionné par les Allemands dès le début de l'occupation en 1940.
En côtoyant régulièrement les soldats, Félicie comprend l'Allemand. Elle en vient à détester l'occupant et c'est pourquoi elle accepte de participer à la Résistance.
Rouée de coups
Le 10 février 1944, elle est arrêtée par la feldgendarmerie allemande de Quimper. Elle distribuait des tracts rédigés en allemand qu'elle mettait dans les poches des capotes, ou dans les cantines des soldats allemands de l'hôtel, tracts du réseau gaulliste visant à démoraliser les troupes allemandes au moment où les rumeurs de débarquement Américain se faisaient plus pressantes.
"J'ai probablement été dénoncée", indique Félicie. Emmenée au siège de la police allemande au Collège St-Charles de Quimper, transformé en prison, elle est rouée de coups, a la mâchoire déviée. On retrouve malheureusement des tracts d'origine gaulliste et communiste chez elle, lors de la perquisition qui suit.
Jugée le 29 mars par la feldkommandantur, elle est condamnée à 6 ans de prison. On le verra par la suite, cette sanction équivaut à une peine de mort, compte tenu des conditions de détention épouvantables.
Transférée en wagons à bestiaux à la prison de Fresnes le 19 mars 1944, elle y rencontre la soeur aînée du Général De Gaulle, Marie-Agnès.
"Elle occupait la cellule au-dessus de moi, et nous parlions par le tuyau du poêle. Le soir, on faisait notre prière ensemble. Elle m'envoyait aussi quelques biscuits et du sucre par le tuyau. A Fresnes, c'était simplement Tante Agnès que je l'appelais", se souvient Félicie.
Marie-Agnès a passé 14 mois à Fresnes avant d'être déportée à Buchenwald, puis dans le Nord du Tyrol, avant d'être libérée en avril 1945. A la suite du Débarquement du 6 juin 1944, les allemands ne veulent pas lâcher leurs proies et transfèrent Félicie en Allemagne .
A nouveau les wagons à bestiaux, où les prisonniers étaient si tassés "que même les morts restaient debout", déclareront certains.
"Les allemands arrêtaient très souvent le convoi pour retirer les cadavres, qu'ils abandonnaient le long de la voie ferrée", se souvient Félicie.
15 jours douloureux de voyage, pour arriver le 24 juin à Waldheim, en Saxe, dans l'Est de l'Allemagne, près de la frontière Polonaise.
Félicie Le Beux allait connaître dans le quartier réservé aux femmes de cette prison pour déportés politiques un véritable enfer qui allait durer dix mois et demi, jusqu'au 7 mai 1945, jour où elle était enfin libérée par les soldats de l'armée russe, à la veille de l'Armistice (8 mai 1945).
"Le Dauphiné Libéré" de ce vendredi 24 avril 2009, consacré à la
"Journée Commémorative de la Déportation"
de Dimanche 26 Avril prochain.
Le journal a pris pour exemple le témoignage de notre amie Félicie Le Beux, qui vit désormais dans le département des Hautes-Alpes et dont on connait la dramatique épopée dans les camps de concentration nazis.
Prenons connaissance, à la virgule près, de cet article du Dauphiné Libéré.
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SOUVENIR.
Félicie Le Beux, ancienne déportée, avec la soeur de
De Gaulle à la prison de Fresnes.
Avant la Journée Commémorative de la déportation dimanche, c'est un tout petit bout de femme haute de 1m47 qui a décidé de témoigner. Le regard gris-bleu, comme l'Atlantique à proximité duquel Félicie Le Beux est née voici 85 ans, à Roudouallec, dans le Morbihan. Revenue de l'enfer de la déportation, cette Bretonne pure souche a vécu sa vie à Chaillol, où nous l'avons rencontrée dans son appartement haut perché, au lieudit "le Belvédère".
Peut-être trop "Haut-Alpine" pour les Bretons et trop Bretonne pour les "Haut-Alpins", l'histoire de Félicie n'a jamais fait beaucoup de bruit, hormis une courte évocation dans le livre de Marie-Anne Caro:
"La lune brille sur le dolmen".
Félicie, qui n'a jamais rien demandé, ne possède aucune décoration ni médaille.
Par contre, elle détient le dossier original de son internement, tel un chemin de croix, écrit en allemand. Un tel dossier vaut toutes les distinctions
et incline au respect.
Probablement dénoncée
20 ans, l'âge du bonheur, dit-on. Pas sûr du tout. Félicie, aînée de trois jeunes soeurs et d'un frère, est serveuse,depuis la mort de sa maman en 1938, à "l'Hôtel de Bretagne" à Saint-Guénolé en Penmarc'h. Cet hôtel-restaurant a été réquisitionné par les Allemands dès le début de l'occupation en 1940.
En côtoyant régulièrement les soldats, Félicie comprend l'Allemand. Elle en vient à détester l'occupant et c'est pourquoi elle accepte de participer à la Résistance.
Rouée de coups
Le 10 février 1944, elle est arrêtée par la feldgendarmerie allemande de Quimper. Elle distribuait des tracts rédigés en allemand qu'elle mettait dans les poches des capotes, ou dans les cantines des soldats allemands de l'hôtel, tracts du réseau gaulliste visant à démoraliser les troupes allemandes au moment où les rumeurs de débarquement Américain se faisaient plus pressantes.
"J'ai probablement été dénoncée", indique Félicie. Emmenée au siège de la police allemande au Collège St-Charles de Quimper, transformé en prison, elle est rouée de coups, a la mâchoire déviée. On retrouve malheureusement des tracts d'origine gaulliste et communiste chez elle, lors de la perquisition qui suit.
Jugée le 29 mars par la feldkommandantur, elle est condamnée à 6 ans de prison. On le verra par la suite, cette sanction équivaut à une peine de mort, compte tenu des conditions de détention épouvantables.
Transférée en wagons à bestiaux à la prison de Fresnes le 19 mars 1944, elle y rencontre la soeur aînée du Général De Gaulle, Marie-Agnès.
"Elle occupait la cellule au-dessus de moi, et nous parlions par le tuyau du poêle. Le soir, on faisait notre prière ensemble. Elle m'envoyait aussi quelques biscuits et du sucre par le tuyau. A Fresnes, c'était simplement Tante Agnès que je l'appelais", se souvient Félicie.
Marie-Agnès a passé 14 mois à Fresnes avant d'être déportée à Buchenwald, puis dans le Nord du Tyrol, avant d'être libérée en avril 1945. A la suite du Débarquement du 6 juin 1944, les allemands ne veulent pas lâcher leurs proies et transfèrent Félicie en Allemagne .
A nouveau les wagons à bestiaux, où les prisonniers étaient si tassés "que même les morts restaient debout", déclareront certains.
"Les allemands arrêtaient très souvent le convoi pour retirer les cadavres, qu'ils abandonnaient le long de la voie ferrée", se souvient Félicie.
15 jours douloureux de voyage, pour arriver le 24 juin à Waldheim, en Saxe, dans l'Est de l'Allemagne, près de la frontière Polonaise.
Félicie Le Beux allait connaître dans le quartier réservé aux femmes de cette prison pour déportés politiques un véritable enfer qui allait durer dix mois et demi, jusqu'au 7 mai 1945, jour où elle était enfin libérée par les soldats de l'armée russe, à la veille de l'Armistice (8 mai 1945).
incroyable !
Félicie relate un épisode particulièrement pénible, vécu au camp de concentration de Waldheim, en Saxe (Allemagne):
Un jour, les prisonnières sont intriguées par le comportement de Milla, qui était l'ancienne secrétaire du Président tchèque Édouard Bénès et qui travaillait aux cuisines. Milla les aidait en leur fournissant des épluchures de légumes, qui leur permettaient tout juste de survivre au moment où les Alliés faisaient
le blocus de la région.
"- Pourquoi enlèves-tu la viande de ton bouillon?
Milla éclata en sanglots:
"- Je ne voulais pas vous le dire,
parce que c'est de la chair humaine!"
Un jour, les prisonnières sont intriguées par le comportement de Milla, qui était l'ancienne secrétaire du Président tchèque Édouard Bénès et qui travaillait aux cuisines. Milla les aidait en leur fournissant des épluchures de légumes, qui leur permettaient tout juste de survivre au moment où les Alliés faisaient
le blocus de la région.
"- Pourquoi enlèves-tu la viande de ton bouillon?
Milla éclata en sanglots:
"- Je ne voulais pas vous le dire,
parce que c'est de la chair humaine!"
le témoignage de l'horreur
Voici la deuxième partie de la série de trois articles parus en cette fin de semaine dans le journal "le Dauphiné Libéré", daté de ce samedi 25 avril 2009.
Madame Félicie Le Beux, originaire de Roudouallec et habitant actuellement le département des Hautes-Alpes (05), apporte son témoignage bouleversant.
....................................
Arrêtée le 10 février 1944 en Bretagne, condamnée à 6 ans de prison pour faits de Résistance, Félicie Le Beux est internée à la prison de Fresnes le 19 mai 1944, où elle passe un court séjour. A la suite du Débarquement du 6 juin, les allemands ne veulent pas lâcher leurs proies si facilement et transfèrent Félicie le 8 juin au fin fond de l'Allemagne.
15 jours interminables de voyage, en wagons à bestiaux, pour arriver le 24 juin à Waldheim, en Saxe, à l'est de l'Allemagne, près de la frontière polonaise.
Les Juifs amenés dans les chambres à gaz
Dès leur arrivée, les Juifs, enfants compris, et les malades, sont dirigés vers les chambres à gaz à l'extérieur de cette prison pour femmes. Dès lors, la triste vie quotidienne, qui allait durer 10 mois et demi, s'installe: lever à 5 heures, travail jusqu'à midi. Pause déjeuner, puis à nouveau travail jusqu'à 18 heures.
On fabriquait à Waldheim des bougies pour sous-marins, divers équipements pour l'armée. Félicie devait tricoter à la machine pas moins de 10 paires de chaussettes par jour.
" Si on ne faisait pas notre quota, on était carrément privées de nourriture",
se rappelle-t-elle...
Chaque jour, un combat contre la mort
Le triste quotidien...L'appel, non pas un nom, mais un numéro:
1061 pour Félicie,
qui prenait souvent des coups de "slogin", cette cravache de cuir tressé qu'abattaient les allemands sur les prisonnières distraites ou épuisées.
Il fallait tenir coûte que coûte. Chaque jour était un combat contre la douleur
et la mort....
Félicie recevra une seule carte de sa soeur Jeanne, acheminée par la Croix-Rouge, durant ces 10 mois de calvaire. (voir la carte dans les photos ci-jointes)
10 mots, pas plus!!!! "Jeanne mariée depuis septembre.Bonne santé ainsi que toute la famille".
Malade, laissée sans soins, Félicie a échappé miraculeusement à la chambre à gaz et au four crématoire.
"Le train qui devait m'emmener au four crématoire a été bloqué par l'avance des Russes, qui ont fait leur jonction avec les forces Américaines
tout près de Waldheim".
Enfin libérée
Les Russes ont libéré la prison dans la nuit du 6 au 7 mai 1945, la veille de l'Armistice (8 Mai 1945). Les Russes ont aidé Félicie à chercher son dossier
et elle a eu une chance inouïe de le retrouver parmi une montagne de documents!!!
"Alors que les prisonnières grimpaient sur les rayonnages, que les dossiers tombaient pêle-mêle, j'ai retrouvé le mien dans le lavabo! Je ne l'ai pratiquement pas cherché!" se souvient-elle...
L'enquête de police y figure avec précisions et tous les événements concernant la prisonnière. L'industrie de mort avait ses méticuleux bureaucrates!
"J'ai pleuré, j'ai eu mal, j'ai prié, j'ai toujours eu avec moi mon chapelet. J'ai eu froid, j'ai eu soif, j'ai eu faim, j'ai souffert de toutes les façons.
Et pourtant non, je ne hais pas les Allemands, je suis retournée en Allemagne, je n'ai aucune haine," déclare aujourd'hui Félicie.
Remise aux Américains trois jours plus tard, Félicie est rentrée à Roudouallec le 27 Mai 1945, devant une HAIE D'HONNEUR DE TOUS LES HABITANTS.
Félicie n'avait pas encore 22 ans, mais d'autres pages allaient s'ouvrir, dont celle concernant les Hautes-Alpes.
......................... à suivre...............
Madame Félicie Le Beux, originaire de Roudouallec et habitant actuellement le département des Hautes-Alpes (05), apporte son témoignage bouleversant.
....................................
Arrêtée le 10 février 1944 en Bretagne, condamnée à 6 ans de prison pour faits de Résistance, Félicie Le Beux est internée à la prison de Fresnes le 19 mai 1944, où elle passe un court séjour. A la suite du Débarquement du 6 juin, les allemands ne veulent pas lâcher leurs proies si facilement et transfèrent Félicie le 8 juin au fin fond de l'Allemagne.
15 jours interminables de voyage, en wagons à bestiaux, pour arriver le 24 juin à Waldheim, en Saxe, à l'est de l'Allemagne, près de la frontière polonaise.
Les Juifs amenés dans les chambres à gaz
Dès leur arrivée, les Juifs, enfants compris, et les malades, sont dirigés vers les chambres à gaz à l'extérieur de cette prison pour femmes. Dès lors, la triste vie quotidienne, qui allait durer 10 mois et demi, s'installe: lever à 5 heures, travail jusqu'à midi. Pause déjeuner, puis à nouveau travail jusqu'à 18 heures.
On fabriquait à Waldheim des bougies pour sous-marins, divers équipements pour l'armée. Félicie devait tricoter à la machine pas moins de 10 paires de chaussettes par jour.
" Si on ne faisait pas notre quota, on était carrément privées de nourriture",
se rappelle-t-elle...
Chaque jour, un combat contre la mort
Le triste quotidien...L'appel, non pas un nom, mais un numéro:
1061 pour Félicie,
qui prenait souvent des coups de "slogin", cette cravache de cuir tressé qu'abattaient les allemands sur les prisonnières distraites ou épuisées.
Il fallait tenir coûte que coûte. Chaque jour était un combat contre la douleur
et la mort....
Félicie recevra une seule carte de sa soeur Jeanne, acheminée par la Croix-Rouge, durant ces 10 mois de calvaire. (voir la carte dans les photos ci-jointes)
10 mots, pas plus!!!! "Jeanne mariée depuis septembre.Bonne santé ainsi que toute la famille".
Malade, laissée sans soins, Félicie a échappé miraculeusement à la chambre à gaz et au four crématoire.
"Le train qui devait m'emmener au four crématoire a été bloqué par l'avance des Russes, qui ont fait leur jonction avec les forces Américaines
tout près de Waldheim".
Enfin libérée
Les Russes ont libéré la prison dans la nuit du 6 au 7 mai 1945, la veille de l'Armistice (8 Mai 1945). Les Russes ont aidé Félicie à chercher son dossier
et elle a eu une chance inouïe de le retrouver parmi une montagne de documents!!!
"Alors que les prisonnières grimpaient sur les rayonnages, que les dossiers tombaient pêle-mêle, j'ai retrouvé le mien dans le lavabo! Je ne l'ai pratiquement pas cherché!" se souvient-elle...
L'enquête de police y figure avec précisions et tous les événements concernant la prisonnière. L'industrie de mort avait ses méticuleux bureaucrates!
"J'ai pleuré, j'ai eu mal, j'ai prié, j'ai toujours eu avec moi mon chapelet. J'ai eu froid, j'ai eu soif, j'ai eu faim, j'ai souffert de toutes les façons.
Et pourtant non, je ne hais pas les Allemands, je suis retournée en Allemagne, je n'ai aucune haine," déclare aujourd'hui Félicie.
Remise aux Américains trois jours plus tard, Félicie est rentrée à Roudouallec le 27 Mai 1945, devant une HAIE D'HONNEUR DE TOUS LES HABITANTS.
Félicie n'avait pas encore 22 ans, mais d'autres pages allaient s'ouvrir, dont celle concernant les Hautes-Alpes.
......................... à suivre...............
"juste informer les jeunes"
Voici la 3ème et dernière partie de la série d'articles parus dans le journal
"Le Dauphiné Libéré" à l'occasion de la Journée du Souvenir des Déportés (dimanche 26 avril 2009), articles dans lesquels notre ancienne compatriote Félicie Le Beux évoque son passé ô combien triste dans les camps de concentration.
..............................................................
On la croyait morte,
une messe avait été organisée en sa mémoire.
Félicie est rentrée à Roudouallec dans sa Bretagne natale le 27 Mai 1945, devant une HAIE D'HONNEUR de TOUS LES HABITANTS.
On la tenait pour morte. Quelques mois auparavant, la grand-mère de Félicie avait organisé une messe en mémoire de la jeune fille. La mort de Félicie avait parcouru tout le village. Ce fut presque la réalité! Félicie, malade, était promise à la chambre à gaz; et elle n'a dû la vie sauve qu'à l'avance de l'armée russe qui a empêché l'accès du convoi ferroviaire à la prison.
Une lente convalescence
Christiane, sa soeur de 10 ans, l'avait attendue avec un bouquet de fleurs. Jeanne, une autre soeur, pleurait: elle s'était mariée en septembre 1944 dans la robe bleue de Félicie, et Louis était né le 26 décembre de cette même année.
Félicie fut dès lors prise sous l'aile protectrice de Madame Yvonne Manceron, veuve d'un gouverneur de Tunisie, qui se consacrait à aider les déportés.
Le long parcours pour faire reconnaître sa qualité de
RÉSISTANTE
À La Ravoine, en Savoie, en maison de repos, Félicie se remettait doucement des séquelles de son internement: problèmes cardiaques, intestinaux; et d'une mauvaise pleurite notamment.
Elle part ensuite chez Yvonne Manceron à Paris, où elle rencontre des amis de cette dernière: Georges Duhamel et André Gide.
Et commence alors le long parcours pour faire reconnaître ses droits à pension et sa qualité de Résistante et de Déportée. La carte correspondante avec le grade de Sergent lui était enfin allouée en 1956.
Mais il faut aussi à la jeune fille reconstruire une vie professionnelle!
"J'avais vu tant de souffrances autour de moi, que j'ai décidé de devenir infirmière pour soulager les gens" explique Félicie.
Et la voilà donc affairée à l'hôpital Laënnec et Necker à ses études d'infirmière.
"Mon pauvre corps de 20 ans
a été brisé de mille façons"
Et rien ne lui sera épargné.
"À l'hôpital Necker, spécialisé dans les enfants malades, on commençait les premières opérations à coeur ouvert. Beaucoup d'enfants mourraient, et c'est moi qui les transportais à la morgue. Je me souviens d'un long couloir; je l'avais appelé le couloir des anges".
Félicie obtient son diplôme d'infirmière en 1959 et s'installe alors à Chaillol,
compte tenu du climat bénéfique pour elle, comme infirmière
à la maison de repos.
Ironie de l'Histoire, Félicie prendra le nom de son mari:
ALLEMAND !
Félicie va se marier le 7 octobre 1961, et prendre Allemand comme nom, celui de son mari Jean, propriétaire de la maison de repos.
De cette union naîtront deux enfants: Anne en 1962, et Jean-Louis en 1963.
Dès lors, la vie se déroulera sans histoire. Félicie occupe aujourd'hui encore un logement dans l'ancienne maison de repos, qui a été revendue et va être bientôt transformée en logements sociaux.
"Je voulais juste informer les jeunes"
Son regard gris bleuté se fait encore plus lumineux lorsqu'elle dit:
"je voulais simplement témoigner, informer les jeunes, mes descendants, pour que plus jamais de telles atrocités ne se reproduisent!
Je n'ai aucune haine contre les Allemands.
Je suis d'ailleurs retournée en Allemagne voici quelques années, chez des amis".
...........................................
Un très fort MERCI à Marie-France Le Bihan-Dubuisson,
nièce et filleule de Madame Félicie Le Beux-Allemand,
sans qui cet Hommage ô combien mérité à sa chère marraine
n'aurait pu être rendu ici.
"Le Dauphiné Libéré" à l'occasion de la Journée du Souvenir des Déportés (dimanche 26 avril 2009), articles dans lesquels notre ancienne compatriote Félicie Le Beux évoque son passé ô combien triste dans les camps de concentration.
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On la croyait morte,
une messe avait été organisée en sa mémoire.
Félicie est rentrée à Roudouallec dans sa Bretagne natale le 27 Mai 1945, devant une HAIE D'HONNEUR de TOUS LES HABITANTS.
On la tenait pour morte. Quelques mois auparavant, la grand-mère de Félicie avait organisé une messe en mémoire de la jeune fille. La mort de Félicie avait parcouru tout le village. Ce fut presque la réalité! Félicie, malade, était promise à la chambre à gaz; et elle n'a dû la vie sauve qu'à l'avance de l'armée russe qui a empêché l'accès du convoi ferroviaire à la prison.
Une lente convalescence
Christiane, sa soeur de 10 ans, l'avait attendue avec un bouquet de fleurs. Jeanne, une autre soeur, pleurait: elle s'était mariée en septembre 1944 dans la robe bleue de Félicie, et Louis était né le 26 décembre de cette même année.
Félicie fut dès lors prise sous l'aile protectrice de Madame Yvonne Manceron, veuve d'un gouverneur de Tunisie, qui se consacrait à aider les déportés.
Le long parcours pour faire reconnaître sa qualité de
RÉSISTANTE
À La Ravoine, en Savoie, en maison de repos, Félicie se remettait doucement des séquelles de son internement: problèmes cardiaques, intestinaux; et d'une mauvaise pleurite notamment.
Elle part ensuite chez Yvonne Manceron à Paris, où elle rencontre des amis de cette dernière: Georges Duhamel et André Gide.
Et commence alors le long parcours pour faire reconnaître ses droits à pension et sa qualité de Résistante et de Déportée. La carte correspondante avec le grade de Sergent lui était enfin allouée en 1956.
Mais il faut aussi à la jeune fille reconstruire une vie professionnelle!
"J'avais vu tant de souffrances autour de moi, que j'ai décidé de devenir infirmière pour soulager les gens" explique Félicie.
Et la voilà donc affairée à l'hôpital Laënnec et Necker à ses études d'infirmière.
"Mon pauvre corps de 20 ans
a été brisé de mille façons"
Et rien ne lui sera épargné.
"À l'hôpital Necker, spécialisé dans les enfants malades, on commençait les premières opérations à coeur ouvert. Beaucoup d'enfants mourraient, et c'est moi qui les transportais à la morgue. Je me souviens d'un long couloir; je l'avais appelé le couloir des anges".
Félicie obtient son diplôme d'infirmière en 1959 et s'installe alors à Chaillol,
compte tenu du climat bénéfique pour elle, comme infirmière
à la maison de repos.
Ironie de l'Histoire, Félicie prendra le nom de son mari:
ALLEMAND !
Félicie va se marier le 7 octobre 1961, et prendre Allemand comme nom, celui de son mari Jean, propriétaire de la maison de repos.
De cette union naîtront deux enfants: Anne en 1962, et Jean-Louis en 1963.
Dès lors, la vie se déroulera sans histoire. Félicie occupe aujourd'hui encore un logement dans l'ancienne maison de repos, qui a été revendue et va être bientôt transformée en logements sociaux.
"Je voulais juste informer les jeunes"
Son regard gris bleuté se fait encore plus lumineux lorsqu'elle dit:
"je voulais simplement témoigner, informer les jeunes, mes descendants, pour que plus jamais de telles atrocités ne se reproduisent!
Je n'ai aucune haine contre les Allemands.
Je suis d'ailleurs retournée en Allemagne voici quelques années, chez des amis".
...........................................
Un très fort MERCI à Marie-France Le Bihan-Dubuisson,
nièce et filleule de Madame Félicie Le Beux-Allemand,
sans qui cet Hommage ô combien mérité à sa chère marraine
n'aurait pu être rendu ici.
message écrit avec mon sang.
Félicie Le Beux a donc été retenue prisonnière à la prison St-Charles de Quimper, avant d'être transférée à Rennes, Fresnes et à Waldheim en Allemagne dans un camp pour prisonniers politiques.
A Quimper, une co-détenue de Félicie était malade et, par crainte de contagion, les Allemands ont libéré cette co-détenue. Félicie en a profité pour écrire un message à son père AVEC SON SANG, en se piquant le bout du doigt, message qui indiquait à son père le lieu où étaient entreposés les explosifs qu'elle cachait chez sa logeuse à St-Guénolé-Penmarc'h.
Le message a été glissé dans la chaussure de sa co-détenue et transmis à son père. Quelque temps après, Monsieur Le Beux père a reçu ce courrier:
Monsieur et Madame Le Beux,
Je n'ai pas encore eu l'honneur de vous connaître. Je vous envoie cette lettre de la part d'une compagne de cellule de votre fille qui m'a prié de vous prévenir de prendre d'urgences de grandes précautions.
Je désirerais s'il est possible de vous parler personnellement le plus tôt possible. Voici mon adresse:
..................................
( par discrétion, l'adresse ne figure pas sur ce blog)
Cette petite lettre était donc destinée à Louis Le Beux (veuf; mais l'auteur de ces lignes ne le savait pas).Le père de Félicie est donc allé de Roudouallec à St-Guénolé-Penmarc'h à bicyclette, pour régler ce problème
et éviter toutes représailles possibles envers la logeuse de sa fille.
Louis Le Beux en avait profité aussi pour porter des colis à sa fille Félicie alors à la prison St-Charles de Quimper.
Comment on peut s'en douter, Félicie ne les a évidemment jamais reçus.
A Quimper, une co-détenue de Félicie était malade et, par crainte de contagion, les Allemands ont libéré cette co-détenue. Félicie en a profité pour écrire un message à son père AVEC SON SANG, en se piquant le bout du doigt, message qui indiquait à son père le lieu où étaient entreposés les explosifs qu'elle cachait chez sa logeuse à St-Guénolé-Penmarc'h.
Le message a été glissé dans la chaussure de sa co-détenue et transmis à son père. Quelque temps après, Monsieur Le Beux père a reçu ce courrier:
Monsieur et Madame Le Beux,
Je n'ai pas encore eu l'honneur de vous connaître. Je vous envoie cette lettre de la part d'une compagne de cellule de votre fille qui m'a prié de vous prévenir de prendre d'urgences de grandes précautions.
Je désirerais s'il est possible de vous parler personnellement le plus tôt possible. Voici mon adresse:
..................................
( par discrétion, l'adresse ne figure pas sur ce blog)
Cette petite lettre était donc destinée à Louis Le Beux (veuf; mais l'auteur de ces lignes ne le savait pas).Le père de Félicie est donc allé de Roudouallec à St-Guénolé-Penmarc'h à bicyclette, pour régler ce problème
et éviter toutes représailles possibles envers la logeuse de sa fille.
Louis Le Beux en avait profité aussi pour porter des colis à sa fille Félicie alors à la prison St-Charles de Quimper.
Comment on peut s'en douter, Félicie ne les a évidemment jamais reçus.